Le Temple d’Hermès Trismégiste
Le Livre de la Monadologie de Liebniz (2)
L’Ésotérisme et l’occultisme hermétique
Dans le Temple d’Hermès, Livre de la Monadologie de Leibniz, de : 1 à 5.
1. La Monade, dont nous parlons ici, n’est autre chose qu’une substance simple qui entre dans les composés ; simple c’est-à-dire sans parties.
2. Et il faut qu’il y ait des substances simples, puisqu’il y a des composés ; car le composé n’est autre chose qu’un amas ou aggregatum des simples.
3. Or là où il n’y a point de parties, il n’y a ni étendue ni figure, ni divisibilité possible ; et ces Monades sont les véritables atomes de la nature et en un mot les éléments des choses.
4. II n’y a aussi point de dissolution a craindre, et il n’y a aucune manière concevable par laquelle une substance simple puisse périr naturellement.
5. Par la même raison il n’y en a aucune par laquelle une substance simple puisse commencer naturellement, puisqu’elle ne saurait être formée par composition.
Dans le Temple d’Hermès, Livre de la Monadologie de Leibniz, de : 6 à 10.
6. Ainsi on peut dire que les Monades ne sauraient commencer ni finir que tout d’un coup ; c’est-à-dire elles ne sauraient commencer que par création et finir que par annihilation, au lieu que ce qui est composé commence ou finit par parties.
7. II n’y a pas moyen aussi d’expliquer comment une Monade puisse être altérée ou changée dans son intérieur par quelque autre créature, puisqu’on n’y saurait rien transposer, ni concevoir en elle aucun mouvement interne qui puisse être excité, dirigé, augmenté ou diminué là-dedans, comme cela se peut dans les composés où il y a du changement entre les parties. Les Monades n’ont point de fenêtres par lesquelles quelque chose y puisse entrer ou sortir. Les accidents ne sauraient se détacher ni se promener hors des substances comme faisaient autrefois les espèces sensibles des scolastiques. Ainsi, ni substance ni accident ne peut entrer de dehors dans une Monade.
8. Cependant il faut que les Monades aient quelques qualités autrement ce ne serait pas même des êtres et si les substances simples ne différaient point par leurs qualités il n’y aurait point de moyen de s’apercevoir d’aucun changement dans les choses, puisque ce qui est dans le composé ne peut venir que des ingrédients simples ; et les Monades étant sans qualités seraient indistinguables l’une de l’autre, puisque aussi bien elles ne diffèrent point en quantité ; et, par conséquent, le plein étant suppose, chaque lieu ne recevrait toujours dans le mouvement que l’équivalent de ce qu’il avait, et un état des choses serait indiscernable de l’autre.
9. Il faut même que chaque Monade soit différente de chaque autre ; car il n’y a jamais dans la nature deux êtres qui soient parfaitement l’un comme l’autre, et où il ne soit possible de trouver une différence interne ou fondée sur une dénomination intrinsèque.
10. Je prends aussi pour accorde que tout être créé est sujet au changement, et par conséquent la Monade créée aussi, et même que ce changement est continuel dans chacune.
Dans le Temple d’Hermès, Livre de la Monadologie de Leibniz, de : 11 à 15.
11. Il s’ensuit de ce que nous venons de dire, que les changements naturels des Monades viennent d’un principe interne ; puisqu’une cause externe ne saurait influer dans son intérieur
12. Mais, il faut aussi, qu’outre le principe du changement il y ait un détail de ce qui change, qui fasse pour ainsi dire la spécification et la variété des substances simples.
13. Ce détail doit envelopper une multitude dans l’unité ou dans le simple ; car tout changement naturel se faisant par degrés, quelque chose change et quelque chose reste, et par conséquent il faut que dans la substance simple il y ait une pluralité d’affections et de rapports, quoiqu’il n’y ait point de parties.
14. L’état passager qui enveloppe et représente une multitude dans l’unité ou dans la substance simple n’est autre chose que ce qu’on appelle la perception, qu’on doit distinguer de l’aperception ou de la conscience, comme il paraîtra dans la suite ; et c’est en quoi les cartésiens ont fort manqué, ayant compté pour rien les perceptions dont on ne s’aperçoit pas. C’est aussi ce qui les a fait croire que les seuls esprits étaient des Monades, et qu’il n’y avait point d’âmes des bêtes ou d’autres entéléchies et qu’ils ont confondu avec le vulgaire un long étourdissement avec une mort a la rigueur, ce qui les a fait encore donner dans le préjuge scolastique des âmes entièrement séparées et a même confirme les esprits mal tournés dans l’opinion de la mortalité des âmes
15. L’action du principe interne, qui fait le changement ou le passage d’une perception a une autre, peut être appelée appétition : il est vrai que l’appétit ne saurait toujours parvenir entièrement a toute la perception où il tend, mais il en obtient toujours quelque chose, et parvient à des perceptions nouvelles.
Dans le Temple d’Hermès,Livre de la Monadologie de Leibniz, de : 16 à 20.
16. Nous expérimentons en nous-mêmes une multitude dans la substance simple, lorsque nous trouvons que la moindre pensée dont nous nous apercevons, enveloppe une variété dans l’objet. Ainsi, tous ceux qui reconnaissent que l’âme est une substance simple, doivent reconnaître cette multitude dans la Monade ; et M. Bayle ne devait point y trouver de difficulté comme il a fait dans son Dictionnaire, article Rorarius.
17. On est oblige d’ailleurs de confesser que la perception, et ce qui en dépend, est inexplicable par des raisons mécaniques, c’est-à-dire par les figures et par les mouvements ; et, feignant qu’il y ait une machine dont la structure fasse penser, sentir, avoir perception, on pourra la concevoir agrandie en conservant les mêmes proportions, en sorte qu’on y puisse entrer comme dans un moulin. Et cela posé on ne trouvera, en le visitant au dedans, que des pièces qui se poussent les unes les autres, et jamais de quoi expliquer une perception. Ainsi, c’est dans la substance simple et non dans le composé ou dans la machine qu’il la faut chercher. Aussi n’y a-t-il que cela qu’on puisse trouver dans la substance simple, c’est-à-dire les perceptions et leurs changements. C’est en cela seul aussi que peuvent consister toutes les actions internes des substances simples.
18. On pourrait donner le nom d’entéléchies à toutes les substances simples ou Monades créées, car elles ont en elles une certaine , il y a une suffisance qui les rend sources de leurs actions internes et pour ainsi dire des automates incorporels.
19. Si nous voulons appeler âme tout ce qui a perceptions et appétits dans le sens général que je viens d’expliquer, toutes les substances simples ou Monades créées pourraient être appelées âmes ; mais, comme le sentiment est quelque chose de plus qu’une simple perception, je consens que le nom général de Monades et d’entéléchies suffise aux substances simples qui n’auront que cela, et qu’on appelle âmes seulement celles dont la perception est plus distincte et accompagnée de mémoire.
20. Car nous expérimentons en nous-mêmes un état où nous ne nous souvenons de rien et n’avons aucune perception distinguée, comme lorsque nous tombons en défaillance ou quand nous sommes accablés d’un profond sommeil sans aucun songe. Dans cet état l’âme ne diffère point sensiblement d’une simple Monade ; mais comme cet état n’est point durable et qu’elle s’en tire, elle est quelque chose de plus.
Dans le Temple d’Hermès,Livre de la Monadologie de Leibniz, de : 21 à 25.
21. Et il ne s’ensuit point qu’alors la substance simple soit sans aucune perception. Cela ne se peut pas même, par les raisons susdites ; car elle ne saurait périr, elle ne saurait aussi subsister sans quelque affection, qui n’est autre chose que sa perception ; mais quand il y a une grande multitude de petites perceptions où il n’y a rien de distingué, on est étourdi ; comme quand on tourne continuellement d’un même sens plusieurs fois de suite, où il vient un vertige qui nous peut faire évanouir et qui ne nous laisse rien distinguer. Et la mort peut donner cet état pour un temps aux animaux.
22. Et comme tout présent état d’une substance simple est naturellement une suite de son état précédent, tellement, que le présent y est gros de l’avenir ;
23. Donc puisque, réveillé de l’étourdissement, on s’aperçoit de ses perceptions, il faut bien qu’on en ait eu immédiatement auparavant, quoiqu’on ne s’en soit point aperçu ; car une perception ne saurait venir naturellement que d’une autre perception, comme un mouvement ne peut venir naturellement que d’un mouvement.
24. L’on voit par là que si nous n’avions rien de distingué, et pour ainsi dire de relevé et d’un plus haut goût dans nos perceptions, nous serions toujours dans l’étourdissement. Et c’est l’état des Monades toutes nues.
25. Aussi voyons-nous que la nature a donné des perceptions relevées aux animaux, par les soins qu’elle a pris de leur fournir des organes qui ramassent plusieurs rayons de lumière ou plusieurs ondulations de l’air pour les faire avoir plus d’efficace par leur union. II y a quelque chose d’approchant dans l’odeur, dans le goût et dans l’attouchement, et peut-être dans quantité d’autres sens qui nous sont inconnus. Et j’expliquerai tantôt comment ce qui se passe dans l’âme représente ce qui se fait dans les organes.
Dans le Temple d’Hermès, Livre de la Monadologie de Leibniz, de : 26 à 30.
26. La mémoire fournit une espèce de consécution aux âmes, qui imite la raison, mais qui en doit être distinguée. C’est que nous voyons que les animaux ayant la perception de quelque chose qui les frappe, et dont ils ont eu perception semblable auparavant, s’attendent, par la représentation de leur mémoire, à ce qui y a été joint dans cette perception précédente, et sont portés à des sentiments semblables à ceux qu’ils avaient pris alors. Par exemple, quand on montre le bâton aux chiens, ils se souviennent de la douleur qu’il leur a causée et crient et fuient.
27. Et l’imagination forte qui les frappe et meut, vient ou de la grandeur ou de la multitude des perceptions précédentes ; car souvent une impression forte fait tout d’un coup l’effet d’une longue habitude ou de beaucoup de perceptions médiocres réitérées.
28. Les hommes agissent comme les bêtes, en tant que les consécutions de leurs perceptions ne se font que par le principe de la mémoire, ressemblant aux médecins empiriques qui ont une simple pratique sans théorie et nous ne sommes qu’empiriques dans les trois quarts de nos actions. Par exemple, quand on s’attend qu’il y aura jour demain, on agit en empirique, parce que cela s’est toujours fait ainsi jusqu’ici. II n’y a que l’astronome qui le juge par raison.
29. Mais la connaissance des vérités nécessaires et éternelles est ce qui nous distingue des simples animaux et nous fait avoir la raison et les sciences, en nous élevant à la connaissance de nous-mêmes et de Dieu ; et c’est ce qu’on appelle en nous âme raisonnable ou esprit.
30. C’est aussi par la connaissance des vérités nécessaires et par leurs abstractions que nous sommes élevés aux actes réflexifs, qui nous font penser à ce qui s’appelle moi, et à considérer que ceci ou cela est en nous, et c’est ainsi qu’en pensant à nous, nous pensons à l’être, à la substance, au simple ou au composé, à l’immatériel et à Dieu même, en concevant que ce qui est borné en nous, est en lui sans bornes. Et ces actes réflexifs fournissent les objets principaux de nos raisonnements.
Dans le Temple d’Hermès, Livre de la Monadologie de Leibniz, de : 31 à 35.
31. Nos raisonnements sont fondés sur deux grands principes, celui de la contradiction, en vertu duquel nous jugeons faux ce qui en enveloppe, et vrai ce qui est opposé ou contradictoire au faux ;
32. Et celui de la raison suffisante, en vertu duquel nous considérons qu’aucun fait ne saurait se trouver vrai ou existant, aucune énonciation véritable, sans qu’il y ait une raison suffisante pourquoi il en soit ainsi et non pas autrement, quoique ces raisons le plus souvent ne puissent point nous être connues.
33. II y a aussi deux sortes de vérités, celles de raisonnement et celles de fait. Les vérités de raisonnement sont nécessaires et leur opposé impossible, et celles de fait sont contingentes et leur opposé est possible. Quand une vérité est nécessaire, on en peut trouver la raison par l’analyse, la résolvant en idées et en vérités plus simples, jusqu’à ce qu’on vienne aux primitives.
34. C’est ainsi que chez les mathématiciens les théorèmes de spéculation et les canons de pratique sont réduits par l’analyse aux définitions, axiomes et demandes.
35. Et il y a enfin des idées simples dont on ne saurait donner la définition ; il y a aussi des axiomes et demandes ou en un mot des principes primitifs, qui ne sauraient être prouvés et n’en ont point besoin aussi, et ce sont les énonciations identiques, dont l’opposé contient une contradiction expresse.
Dans le Temple d’Hermès, Livre de la Monadologie de Leibniz, de : 36 à 40.
36. Mais la raison suffisante se doit aussi trouver dans les vérités contingentes ou de fait, c’est-à-dire dans la suite des choses répandues par l’univers des créatures, où la résolution en raisons particulières pourrait aller à un détail sans bornes, à cause de la variété immense des choses de la nature et de la division des corps à l’infini. Il y a une infinité de figures et de mouvements présents et passés qui entrent dans la cause efficiente de mon écriture présente, et il y a une infinité de petites inclinations et dispositions de mon âme présentes et passées qui entrent dans la cause finale.
37. Et comme tout ce détail n’enveloppe que d’autres contingents antérieurs ou plus détaillés, dont chacun a encore besoin d’une analyse semblable pour en rendre raison, on n’en est pas plus avancé, et il faut que la raison suffisante ou dernière soit hors de la suite ou séries de ce détail des contingences, quelque infini qu’il pourrait être.
38. Et c’est ainsi que la dernière raison des choses doit être dans une substance nécessaire, dans laquelle le détail des changements ne soit qu’éminemment, comme dans la source, et c’est ce que nous appelons Dieu.
39. Or, cette substance étant une raison suffisante de tout ce détail lequel aussi est lié partout, il n’y a qu’un Dieu, et ce Dieu suffit.
40. On peut juger aussi que cette substance suprême, qui est unique, universelle et nécessaire, n’ayant rien hors d’elle qui en soit indépendant, et étant une suite simple de l’être possible, doit être incapable de limites et contenir tout autant de réalités qu’il est possible.
Dans le Temple d’Hermès, Livre de la Monadologie de Leibniz, de : 41 à 45.
41. D’où il s’ensuit que Dieu est absolument parfait ; la perfection n’étant autre chose que la grandeur de la réalité positive prise précisément, en mettant à part les limites ou bornes dans les choses qui en ont. Et là où il n’y a point de bornes, c’est-à-dire en Dieu, la perfection est absolument infinie.
42. Il s’ensuit aussi que les créatures ont leurs perfections de l’influence de Dieu, mais qu’elles ont leurs imperfections de leur nature propre, incapable d’être sans bornes, car c’est en cela qu’elles sont distinguées de Dieu.
43. Il est vrai aussi qu’en Dieu est non seulement la source des existences, mais encore celle des essences, en tant que réelles ou de ce qu’il y a de réel dans la possibilité : c’est parce que l’entendement de Dieu est la région des vérités éternelles ou des idées dont elles dépendent, et que sans lui il n’y aurait rien de réel dans les possibilités, et non seulement rien d’existant, mais encore rien de possible.
44. Car il faut bien que s’il y a une réalité dans les essences ou possibilités, ou bien dans les vérités éternelles, cette réalité soit fondée en quelque chose d’existant et d’actuel, et par conséquent dans l’existence de l’être nécessaire, dans lequel l’essence renferme l’existence ou dans lequel il suffit d’être possible pour être actuel.
45. Ainsi Dieu seul (ou l’Etre nécessaire) a ce privilège qu’il faut qu’il existe, s’il est possible. Et comme rien ne peut empêcher la possibilité de ce qui n’enferme aucune borne, aucune négation, et par conséquent aucune contradiction, cela seul suffit pour connaître l’existence de Dieu a priori. Nous l’avons prouvé aussi par la réalité des vérités éternelles. Mais nous venons de la prouver aussi a posteriori, puisque des êtres contingents existent, lesquels ne sauraient avoir leur raison dernière ou suffisante que dans l’être nécessaire, qui a la raison de son existence en lui-même.
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